La fenêtre grande ouverte, Chelsea, allongée dans son lit, la tête vide de toutes pensées, savourait la chaleur des rayons du soleil sur sa peau fermant ses yeux. En cette matinée, elle avait une paresse incroyable, désireuse de rester là à ne rien faire de la journée. Il faut dire que la proposition était alléchante, oui mais voilà elle avait mieux à faire que de traîner au lit jusqu'à point d'heure. La douce brise matinale qui s'engouffrait par la fenêtre venait lui chatouiller le visage, faisant voler ses cheveux à tout va. Chels finit par ouvrir les yeux, jetant un coup d'oeil rapide à l'heure, c'est bon elle était dans les temps, néanmoins, il ne fallait pas traîner. La jeune femme avait aujourd'hui rendez-vous avec son ami, Andrew, il lui avait proposé de venir prendre un bon petit déjeuner dans sa suite à l'hôtel Hilton. Elle ne pouvait refuser une telle invitation, et puis il fallait dire aussi que cela faisait quelques jours déjà qu'elle n'avait pas vu son ami, elle avait pas mal de choses à lui raconter, entre autre l'étrange rêve qu'elle avait vécu quelques jours auparavant à New Heaven, et qu'elle ne s'expliquait toujours pas. Choisissant avec soin sa tenue, car oui Chelsea aime être coquette en toute circonstance, la demoiselle appliqua une légère touche de maquillage sur son beau visage afin de faire ressortir son teint pâle. Attrapant son sac à main au passage, elle sortit pour prendre place au volant de sa voiture, un beau cabriolet, cadeau de ses parents trop gâteux, puis se mit en route pour le centre ville là où se trouvait l'hôtel. Roulant à vitesse plutôt élevée, la belle détestant les contraintes et autres restrictions de vitesse qui la dérangeait plus qu'autre chose, elle mit peu de temps à rejoindre le lieu du rendez-vous, se garant sur l'une des rares places qu'il restait de libre sur le parking de l'hôtel. Une fois arrivée à la réception, on lui indiqua la chambre d'Andrew. Chels frappa alors à la porte, attendant patiemment qu'on vienne lui ouvrir, admirant par la même le luxe et la beauté des lieux, un hôtel réputé pour sa qualité et son confort appartenant à la célèbre et richissime famille Hilton. Les murs se dressaient devant elle, d'une couleur blanc cassé éclatante, bordés de grandes vitres majestueuses couleur or laissant alors rentrer la lumière, qui, par un effet d'optique agrandissait considérablement l'étendue des lieux. La porte de la chambre s'ouvrit, tirant la belle de ses songes. Elle sourit au jeune homme qui l'accueillit dans sa suite, et entra après l'avoir salué comme il se doit.

- Encore merci pour l'invitation, déclara Chels ravie d'être en sa compagnie. Tu vas bien toi ?

Bien que Chelsea était une connaisseuse des soirées mondaines, elle n'avait encore jamais eu l'occasion d'entrer dans l'une des suites de l'hôtel. Émerveillée par la grandeur et la somptuosité de celle de son ami, elle ouvrait grands les yeux, comme pour ne rien perdre du spectacle qui se présentait à elle.

- Tu m'avais cachée que tu étais dans un si beau palace !

Elle rit, les yeux pétillants de malice comme à son habitude, avant de suivre Andrew qui la devançait.

Un nouveau soleil naquit dans les cieux clairs ; quelques uns de ses rayons filtraient à travers les jalousies, légèrement rabattues. De la fumée formait des rouleaux bleus que le vent happait délicatement ; on entendait les bruissements de touches, celle de sa vieille machine à écrire. Les voiles satinées des rideaux dansaient dans les airs tièdes. Il posa son regard par de là la fenêtre, contempla les nuages et les cieux teintés par les mêmes éclats ; il inspira une bonne bouffée d’air, tira un coup sur son cigare cubain puis le reposa dans le cendrier en ivoire. Ses yeux accompagnèrent chaque lettre qu’il inscrivit sur la feuille vierge de toute vérité ; cet article retraçait le parcours pas moins glorieux de la vedette du moment, son cher frère, James. Andrew enchaina les lettres, les mots, les adjectifs louant ses mérites, son talent. A travers son papier, son aîné était pratiquement décrit comme un Dieu vivant ; ses prouesses musicales étaient chantées avec une ferveur admirable, ses élans de sympathie étaient dépeints comme une toile où les plus belles nuances étincellent. Rien n’avait été laissé au hasard dans ce portrait dithyrambique. A.J voulait faire plaisir à son frère, et puis c’était LIFES qui lui avait demandé de rédiger le portrait d’une icône actuelle. James Taylor était la parfaite vedette masculine ; en plus de côtoyer le monde des affaires et de la musique, il s’apprêtait à devenir l’égérie du premier parfum pour Hommes signé Just Glamour. L’autrichien se devait de relayer ce fait à la gazette tributaire de MODE. Il acheva le premier paragraphe, reprit machinalement une bouffée de son cigare, la recracha, plongea son regard dans le vide, se laissa allé au gré des pensées et des vents contraires puis songea à Joanna. Revoir briller dans ses yeux le portrait du mannequin le fit sourire, le fit planer presque. Et le rendit aigre en même temps; elle l'avait trahi. Il la haïssait désormais et voulait se venger d'elle. Il se redressa de sa chaise, s’approcha de la fenêtre qu’il ouvrit entièrement ; les fumées blanches se dissipèrent dans les airs. Le soleil éclaira le visage du dandy qui contemplait en silence le paisible quartier proche de l'hôtel Hilton où fourmillaient quelques passants pressés. Il avait décidé de s'extraire quelques jours de la société confuse et curieuse de Beverly Hills afin de se retrouver seul; les paparazzis habillaient les rues du quartier, à sa recherche dans l'espoir qu'il ne leur livre son malheur pour quelques clichés. Déjà ceux d'une Joanna complètement changée faisaient le tour des médias, il avait honte; comment était-il sortit avec ça? Comment avait-il pu croire qu'avec ça on pouvait avoir un quelconque avenir? Minable. Sagement, le mondain se délecta du silence, muse inspiratrice et féconde. Ses yeux errèrent sur la toile feutrée du ciel ; son sourire s’intensifia lorsqu’il songea à la vengeance. Soudain, quelqu’un le tira de ses songeries. Ce devait être Chelsea, elle était en avance à leur rendez-vous pour un petit déjeuner gourmand au Hilton. On toqua à la porte à deux reprises. Le dandy grommela quelques jurons en autrichien puis fit le détour rapidement ; posant sa main sur la poignée de la porte, il l’ouvrit aussitôt. Il se retrouva face à Chelsea. Sa protégée était toujours aussi enjouée, bien qu'un peu inquiète vu son regard terne. Elle était très en avance pour l'heure! Andrew la fit entrer et referma la porte derrière elle. Affichant un air railleur, le mondain murmura :

- C'est tout naturel. Mais je ne savais pas que tu étais à ce point ponctuelle, c'est une bonne chose pour toi, ça te servira plus tard, dit-il avec un clin d'oeil. Ca peut aller, tu sais avec l'histoire de Joanna et nos fiançailles rompues, j'ai un peu défailli, mais je ne vais pas me laisser faire. Bref, tu as parfaitement raison, un palace rien que pour moi. La villa à Beverly Hills m'étouffait. Tout y était oppressant sans parler des paparazzis qui sont collés aux fenêtres. Il sourit un peu, afin de cacher sa rage et son chagrin. Comment ça, tu n'es jamais entrée dans un tel palace? Rappelle moi te payer ne serait-ce qu'une nuit ici, tu vas voir comme c'est fabuleux! La jeune femme lui tendit son manteau qu’il déposa soigneusement à l’entrée. Elle avança jusqu’au salon et se jeta dans un canapé ; elle ôta ses lunettes de soleil et esquissa un sourire, impatiente. Son estomac devait crier famine. Tu as faim on dirait. Viens voir par là, dit-il en lui indiquant d'un geste de l'index la terrasse pleine de soleil. La jeune fille lui emboita le pas et découvrit une table richement dressée; les couverts étincelaient, des croissants, du miel, des confitures, des fruits de toutes les couleurs et d'autres assortiments du matin inondaient de leurs tons épicés la toile blanche de la nappe. Le temps était radieux, bien ensoleillé, sans trop être brûlant ce qui allait rendre ce petit déjeuner très savoureux. La vue sur toute la ville rendait l'endroit encore plus impressionnant et superbe. Poussant doucement une chaise, Andrew fit ainsi installer sa protégée qui avait le regard complètement lumineux ; les plats riches de couleurs et de saveurs lui faisaient terriblement envie. Calmement, le dandy prit place sur son côté droit et lui servit un verre de jus. Sers-toi, j'ai tout commandé pour toi! dit-il avec un petit sourire. Il reposa la carafe sur la table. Alors, dis-moi comment vas-tu? Sincèrement Chelsea. Tu sais que je devine quand on me ment. Un sourire enjoué se dessina sur ses lèvres: il voulait l'encourager à tout lui dire. Absolument tout.

Des matinées comme celle-là Chelsea en demanderait encore et encore, et qui ne rêverait pas d'un petit déjeuner dans le prestigieux hôtel Hilton aux côtés d'un journaliste de renom, star de sa génération, habile manipulateur des mots, maître dans l'art des élogieuses métaphores, faisant vibrer l'Amérique avec ses sublissimes articles, soit le grand A.J ? Tout le monde ferait des montagnes pour être ne serait-ce que quelques instants à la place de la demoiselle, c'est un fait. Mais cette vie là, elle ne l'échangerait pour rien au monde, bien trop habituée au luxe, à la richesse et la mondanité, et ce depuis son enfance, alors une fois dans la suite de son ami, elle se trouvait dans son élément, tel un poisson dans l'eau, profitant des joies et de la chance que lui offrait la vie de connaître cet univers. Elle avait parcouru du chemin au fil du temps, perçant et se faisant une petite place qui ne cessait de croître dans ce monde où les apparences et le talent sont de mises, tout comme son carnet d'adresses d'ailleurs, elle comptait désormais dans ses précieux amis de respectueuses personnes plus importantes et connues les unes que les autres. On pouvait citer sans problème Austin, jeune acteur très prometteur et déjà à l'affiche de grands succès hollywoodiens, s'avérant être son meilleur ami, mais aussi Andrew une pointure toute aussi rare et non négligeable à la plume plus qu'appréciable. D'ailleurs il était comme un modèle pour la demoiselle qui était très admirative devant son travail. Elle l'avait rencontré un jour au hasard des couloirs de MODE, il avait dès le début guidé la jeune fille, se montrant désormais là pour elle en cas de besoin, une sorte de protecteur, de grand frère somme toute sur qui elle pouvait compter quoi qu'il arrive. C'est alors poliment et le plus naturellement du monde qu'Andrew l'accueillit et débarrassa la jeune fille de son manteau. Il ne put s'empêcher de lui faire remarquer sa ponctualité, c'était un fait, Chelsea détestait plus que tout être en retard à un rendez-vous, disons surtout que dans le milieu de la mode, et si elle voulait percer en tant que journaliste, elle avait plutôt intérêt à savoir être ponctuelle, disponible sinon elle pouvait dire au revoir à ses rêves, et ça c'était hors de question. Elle sourit à son clin d'oeil.

- Que veux-tu, je me déplace à la vitesse du vent. Plaisanta-t-elle pour conserver un peu de mystère face à une qualité plutôt rare chez une femme, et pourtant c'est dire que Chelsea était tout sauf quelqu'un de bien organisée. Je suis sûre que ça me sera utile en effet, tu imagines si j'arrivais en retard à un entretien avec le patron d'un grand magazine de mode ?! Non, inadmissible ! Elle sourit imaginant une telle scène, plutôt improbable. Oui je sais que c'est dur pour toi cette histoire de fiançailles et je suis d'ailleurs navrée qu'une telle chose soit arrivée, tu mérites d'être heureux avec elle. Mais tu sais, reprit-elle en parlant de son amie, Joanna est vraiment une fille bien, alors tâche de tout faire pour ne pas la laisser filer. Chelsea lui offrit un joli sourire parfaitement dessiné, sublimant les traits de son minois de poupée, elle connaissait si bien le côté Dom Juan du jeune homme. Tu as très bien fait, ici au moins tu peux voir du monde, et puis tu sais quoi, au diable les paparazzis, ils ne nous gâcheront pas cette merveilleuse journée ! L'optimiste de Chelsea en amusait plus d'un, elle était comme cela, un tant soit peu "Carpe Diem" et adepte de l'épicurisme sur les bords, et ce toujours avec le sourire, c'était bien mieux que de se prendre la tête pour des choses plus futiles les unes que les autres. Ainsi soit-il ! Et oui, soit surpris, mais de toutes les soirées mondaines auxquelles j'ai eu la chance participer, aucune ne se déroulaient ici. Il faut un début à tout. Elle lui lança un clin d'oeil. En tout cas, ça sera avec plaisir pour la nuit je ne doute aucunement de la magie des lieux, mais c'est hors de question que tu prennes tout à ta charge, tu m'as déjà invité ce matin et c'est adorable, la prochaine fois ça sera mon tour ! Andrew était un dandy très sympathique, et très bien élevé qui connaissait les bonnes manières à user avec les femmes, mais malheureusement pour lui, miss Reynolds était têtue.

Prenant place sur le grand canapé en cuir, couleur crème qui décorait royalement la pièce, elle retira ses belles lunettes de soleil noires, non pas que le soleil tapait vraiment fort aujourd'hui mais parce que se sont, il fallait l'avouer, de vraies lunettes de star et avec elles, n'importe qui avait la classe internationale ! Elle attendait patiemment son ami, ce dernier l'interpella alors, l'invitant à le suivre vers la terrasse. Une gigantesque terrasse qui offrait une vue imprenable sur la ville, et sur laquelle était soigneusement dressée la plus royale des tables, abondamment remplie de nourriture et boissons en tout genre, tout ceci en prime éclairé par les rayons du majestueux Soleil, donnait une scène époustouflante, digne de célèbres peintures, à vous couper le souffle. Cette intrusion soudaine de multiples saveurs avait le pouvoir de vous faire voyager avec des mets venant des quatre coins du monde, qui mettaient de suite l'eau à la bouche. Continuant d'admirer le spectacle qui s'offrait à elle, Chelsea prit place sur la chaise qu'Andrew tira à son intention.

- Quel gentleman, Monsieur ! Déclara-t-elle d'un air amusé à son journaliste préféré. Il s'installa à son tour à ses côtés et lui servit un verre. Le remerciant chaleureusement, Chelsea suivit son conseil et après avoir admiré avec attention tout ce qui se présentait à elle, la jeune femme prit un des croissants présent dans la corbeille avant de tendre celle-ci à son ami. Tout ce choix, je suis bien gâtée, merci Andrew. Elle déposa un baiser amical sur la joue de son ami, puis l'écoutait reprendre la parole. Alors comme ça il avait vu que quelque chose au fond d'elle la tracassait ? De toute façon, il fallait bien aborder le sujet à un moment ou à un autre, non ? Elle soupira repensant à cette histoire entre April, Matthew et elle, puis bu une gorgée du cocktail avant de se lancer dans de longues explications. Matthew... réussit-elle à articuler dans un souffle presque inaudible. Il s'est passé quelque chose d'étrange l'autre jour à New Heaven, j'ai fait une sorte de rêve dans lequel April et Matthew avaient un avenir commun ensemble avec des enfants et tout ces trucs qui dressent le portrait de la "famille idéale", bref. Et ce qu'il y a de vraiment étrange c'est qu'ils ont fait exactement le même rêve en même temps. Et puis on a essayé d'en parler tous les trois, mais cette idiote d'April a tout gâcher sous prétexte qu'elle ne peut pas me voir en peinture, du coup elle s'est plus ou moins brouillée avec Matt et il m'en veut de l'avoir éloigné de sa meilleure amie. Comme si j'étais la seule responsable. Voilà elle l'avait fait, elle avait à peu près tout déballé de son histoire. Elle leva les yeux au ciel en évoquant le nom d'April Williams, elle avait décidément l'envie de lui pourrir le vie celle-là ! Marquant une pause, elle regarda inquiète la réaction de son ami, il allait peut-être la prendre pour une vraie folle avec son histoire de rêve, il ne manquerait plus qu'il lui dise "Ma pauvre Chelsea tu es bonne à faire interner". Ça fera trop plaisir à Williams tiens ... Il est parti peu après, je crois qu'il ne veut plus me parler. Elle baissa la tête sur son assiette repensant à ce détestable moment. A vrai dire, elle regrettait déjà de lui avoir dit tout cela, comme si Andrew n'avait pas assez de problèmes comme cela entre son travail et sa vie personnelle, en plus des médias, des paparazzis à gérer, pour avoir en plus sur le dos les lamentations d'une jeune étudiante. Tu sais quoi, oubli ! C'était une mauvaise idée de parler de cela, je ne voulais pas t'embêter. J'ai vu que ta machine à écrire était posée vers ton bureau, nouvel article ? Dit-elle pour changer de sujet, cependant il n'y avait que très peu de chances pour qu'il laisse tomber l'affaire comme ceci. Tu écris sur quoi ? Même si elle espérait le relancer avec le journalisme, elle s'intéressait tout de même énormément à ce qu'il faisait, étant une de ses plus grandes admiratrices et surtout une de ses premières lectrices, elle lisait tous ses articles dès que ceux-ci paraissaient dans les nouveaux numéros de LIFES.

En ouvrant la porte, le journaliste tomba nez à nez avec Chelsea qui était pile à l’heure. A.J fut surpris de sa ponctualité, car les jeunes femmes de son âge adoraient se prélasser chez elles et manquaient souvent l’heure des rendez-vous. Il la débarrassa de son manteau puis l’invita à prendre ses aises dans sur la terrasse. Guettant d’un œil amusé sa protégée, le mondain ne put s’empêcher d’en conclure qu’elle était ravie de passer un moment avec lui. Mais lui aussi l’était totalement. Ils ne s’étaient pas vus depuis un mois ; A.J avait beaucoup d’articles à rédiger, quant à Chelsea, elle terminait brillamment son parcours estudiantin. Et puis, il y avait les histoires de cœur, lui avec Joanna et Naomi. Et aujourd’hui, le voilà entrant une fois encore dans une période sombre ; cette rupture l’avait détruit. D’abord, il en avait fait l’amère expérience avec Naomi. Puis présentement avec Joanna. Et Naomi qui venait de retourner en ville…Tout était si compliqué. En y songeant, son cœur fut pris d’un tremblement convulsif qu’il apaisa aussitôt en apportant à ses lèvres, le doux nectar d’ambre. C’était une petite fiole qu’il gardait dans la poche de sa chemise. Tendant un verre de jus à sa protégée, celle-ci esquissa un grand sourire tout en jouant les fières. Le mondain déposa alors la carafe de cristal sur la table basse puis se tassa dans le fauteuil en osier, attendant de sa part une quelconque réaction. Ce qui ne tarda pas ; Chelsea était très bavarde ! Totalement inadmissible, ne tente pas le Diable en faisant cela. Ce serait mal vu. Lorsqu’ils en vinrent à parler de l’incident des fiançailles, le journaliste se raidit : le silence de plomb alourdissait l’ambiance à mesure que les minutes défilaient lentement; la brune prit l’initiative de parler en premier, tentant d’insuffler ainsi à Andrew le courage de se confesser. Le dandy, dont le regard brillait de larmes cachées, ne put s’empêcher d’acquiescer lorsque Chelsea mena à bien un interrogatoire ; malgré son optimisme naïf, le jeune homme n’était pas prêt à s’engager de nouveau sur cette montée sinueuse. Il avait perdu sa fierté lors de ce séjour à la Réunion. Elle avait tout gâché, tout ! Son visage s’empourpra alors qu’il tendit une assiette de fruits à la jeune fille. Non Chelsea, je crains qu’une telle chose soit improbable. Totalement improbable ! Discrètement, le mondain avala d’une traite l’alcool ambré, tout en enchaînant les confessions sur le même ton dédaigneux. Elle m’a humilié, elle a complètement fichu en l’air le voyage et tu veux que je sois indulgent et que je veuille la reconquérir ? Sincèrement, jamais. Sur le coup, l’autrichien voyait rouge : il réprima un soupir d’agacement alors que Chelsea essayait de le raisonner en ayant une pensée positive. Il se contenta alors d’acquiescer ; la jeune fille était encore naïve, une vraie fleur bleue. Elle ne savait rien de la cruauté noire de certaines personnes. Et c’était sans doute tant mieux ainsi. Oui, tu as raison. Ce n’est pas plus mal. Le room service est parfait, la vue sublime, et puis tu es là donc je n’ai pas à me plaindre davantage. Dit-il avec un léger sourire. Je t’en prie, ce n’est rien pour moi et tu le mérites amplement. Tu as été une assistante de talent cet hiver, tu m’as beaucoup aidé et tu mérites que je te fasse ce cadeau. Ce sera tout de même une surprise, car une partie de l’hôtel possède des chambres à thème, tu vas voir, c’est particulier. Soutenant le regard brillant de sa protégée, le jeune homme ne put s’empêcher de sourire amusé.

Une fois attablés et servis, les deux amis restèrent durant de longues minutes à contempler les cieux se dorant sous les rayons vifs de l’astre éternel. Il déposa sa petite fiole sur la table et se servit à son tour un verre de jus ; ce n’était en rien délectable, mais cela lui permettrait d’apaiser quelque peu sa soif et de paraître plus ‘humain’. La jeune fille baissa la tête et soupira. En effet, quelque chose la tracassait. Elle aborda le nom de Matthew. Elle parlait certainement du trublion du clan Cullen. A ses dires, la situation semblait grave et le dénouement terrible ; le dandy éprouva de la peine pour sa protégée, elle paraissait sincèrement navrée de voir que les choses ne s’étaient pas passées comme elle l’avait espéré entre Matthew, April et elle. Visiblement le cas récurant de ces visions touchait tout le monde ; la chose était-elle finalement à prendre on ne peut plus au sérieux ? Le journaliste laissa calmement Chelsea poursuivre, mais très vite, la gêne et la confusion lui firent changer d’avis. Elle adressa un regard teinté de curiosité vers le bureau où reposait sa précieuse machine à écrire, style XIXème siècle, son bien le plus précieux et le plus inestimable. Un vrai souvenir, une antiquité. C’avait été avec elle qu’il avait rédigé ses premiers articles lors de la prohibition avec Al Capone et compagnie, c’était également ces articles qui avaient précipité sa chute vers l’enfer…Il redressa la tête et tendit à sa protégée une corbeille de fruits exotiques. Chelsea, ne change pas de sujet. Cela ne me gêne en rien, sincèrement et si mes conseils peuvent t’aider, j’en serais le plus heureux. Il me semble clair que ces visions ou ces rêves ne soient pas anodins, tu vas sans doute trouver cela étrange, mais une bonne partie des gens que je connais ont également été atteints par ce phénomène, moi également. Dans ce cas, il ne faut pas se renfermer sur soi-même, c’est vraiment très bien de ta part de m’en avoir parlé. Maintenant, je pense qu’il est clair que Matthew te tient pour coupable de sa rupture amicale avec April. Il va t’en vouloir encore longtemps. Je connais assez bien April Williams vu que mon frère est son protecteur et la sponsorise dans son petit club de jazz. A mon sens, il faut que tu ailles vers Matthew et que tu lui expliques clairement la situation. Fais lui comprendre que tu lui fais confiance, mais que ces choses t’ont troublée d’où ta réaction. Et que tu ne voulais en aucun cas de son amitié avec April vole en éclat. Tu n’as pas à te sentir coupable, tu n’as rien fait de mal. Tu as fait quelque chose de naturel en défendant ta place, tu n’as strictement pas à avoir honte de cela. Dit-il en lui adressant un léger sourire. Si Matthew tient sincèrement à toi, il comprendra. Laisse lui le temps de la réflexion, et laisse le toi également. Ces visions brouillent les esprits et rendent les gens incroyablement mauvais. Ca a également été le cas pour moi. Il faut garder la tête haute et ne pas négliger ses objectifs. Si ces songes détaillent la vie future de Matthew et d’April, tu dois tout faire pour protéger sa place. Tu l’as déjà fait et visiblement cela n’a pas été particulièrement réussi, mais il faut continuer dans ce sens et prouver que tu as agi naturellement et surtout par amour. Ne te laisse pas corrompre par la réaction excessive de Williams, ou le tempérament agité et boudeur de Cullen. Ne laisse jamais personne t’atteindre. Il faut que tu restes forte et que tu gardes la tête haute coûte que coûte, en t’imposant fermement et subtilement. Cela en va de même pour ta carrière à venir. La froideur n’est jamais une bonne attitude à avoir, mais elle te permet de te protéger et de rester extérieur à certains soucis, et dans ton cas comme dans le mien, c’est toujours utile. Reste sincère aussi. Et puis, je pense que Cullen t’aime vraiment, donc il comprendra, expliqua-t-il en faisant référence à la profonde affection qu’il avait vue entre les deux jeunes gens une fois qu’il s’était rendu à un gala chez les Cullen. Il jeta un coup d’œil vers la machine à écrire puis déclara, tout sourire. Là, je me lance dans quelque chose de plus fantaisiste, sans conventions, j’essaye des nouvelles. J’ai envie de m’écarter un peu du style presse à scandale et description sèche de faits. Sinon j’ai terminé un article avant-hier, mais il n’est pas fameux, je dois le refaire. Je manque cruellement d’inspiration, le syndrome de la page blanche, affirma t-il en soupirant et en s’accoudant à la table. Et toi, tu as eu le temps d’écrire quelque chose ces derniers temps ? Je sais que tu es membre du club de journalisme de New Heaven, cela fonctionne t-il toujours aussi bien ? Il afficha un sourire tendre, avenant. Chelsea était une de ses plus belles fiertés ; elle allait faire de belles choses…De très belles, il en était persuadé.

Alors qu'ils étaient tous deux installées devant une table ô combien magnifique, à l'esprit même de ce somptueux et luxueux hôtel, remplie de mets plus délicieux les uns que les autres. Ce qui eut le don d'illuminer le visage de la jeune fille d'un très beau sourire, c'était trop d'honneur qu'Andrew lui faisait là, elle avait l'impression d'être une vraie princesse. Il n'y a pas à dire, elle aimait décidément trop ce style de vie pour ne pas percer un jour dans la mode et dans la prestigieuse agence du pays; son rêve ultime. Le jeune homme semblait tout aussi heureux de recevoir son invitée dans sa majestueuse suite, cependant son visage radieux s'assombrit vite lorsque le sujet tabou le concernant lui et Joanna fut abordé. Évidement, Chels n'avait aucune envie de blesser son ami ou de lui rappeler de douloureux souvenirs, elle avait simplement souhaité donner son avis sur le sujet, trouvait le comportement d'Andrew un tant soit peu catégorique, il avait un tempérament assez fort tout comme Chelsea et mine de rien, il partait quelque fois dans les extrêmes. Tout du moins, d'après ce que la jeune fille avait entendu de cette histoire, certes Joanna avait été blessante, mais ça n'avait été en aucun cas pour remettre en cause l'amour qu'elle portait au journaliste. Il faut croire cependant qu'il n'avait guère apprécié son comportement, et étant assez colérique voire rancunier, ça avait dû mal passer, c'était ce que Chelsea en conclu. Néanmoins elle n'aimait pas le voir si malheureux à cause de cela. Elle soupira avant de partager avec lui le fond de sa pensée, espérant que ça puisse alléger un peu les blessures de son coeur.

- Naturellement, je n'ai pas connaissance de tout ce qu'il s'est passé durant ce séjour, mais je sais que Joanna a bon fond. Elle a peut-être mal agit, je veux bien te croire, l'erreur est humaine. Mais elle n'avait pas réellement l'intention de te blesser si tu veux mon avis, elle t'aime sincèrement, quand on vous voit tous les deux on le sait, on le sent. Ce que je veux te dire là, ce n'est pas de passer l'éponge et de tout oublier comme si rien ne s'était passé; non ce n'est pas ça, je veux simplement ton bonheur, alors si tu ne veux plus rien n'avoir à faire avec elle, libre à toi. Simplement assure-toi avant tout, que c'est réellement ce que tu veux et que ça n'est pas la colère qui parle, assure-toi que ça ne te fera pas plus de mal que de bien. Tu n'es pas obligé de la reconquérir non, sourit-elle, à part si tu réalises que tu l'aimes toujours, mais au moins, si tu parles de cela avec elle et que tu réussis à te libérer de cette colère et de cette rancoeur, alors c'est l'essentiel, parce que c'est à toi que tu fais du mal comme ça.

Voilà c'était dit, qu'il en pense ce qu'il veule, mais malgré son jeune âge la brune savait très bien qu'une part de vérité résidait dans ses propos, après tout on dit bien que la valeur n'attend point le nombre des années ! Elle regardait alors A.J reprendre des couleurs sitôt qu'ils changèrent de sujet, ses yeux redevinrent lumineux et l'ambiance bonne enfant. La jeune fille l'écoutait ne pouvait retenir plus longtemps son envie de rire.

- Si tu n'as pas à te plaindre de ma présence, alors tant mieux, j'en suis heureuse. C'est très gentil ce que tu me dis là, il faut dire que l'assistante avait un patron de grand exemplaire, maître dans l'art de l'écriture. Déclara-t-elle tout sourire. Je n'en doute pas un instant, c'est un hôtel très accueillant. Des chambres à thème, vraiment ? Quel genre de thème ? Demanda-t-elle alors, Andrew ayant éveillé sa curiosité.

Les conversations entre les deux jeunes gens allaient bon train, mais très vite la gêne ressenti au départ par Andrew lorsqu'ils avaient abordé le "sujet Joanna", s'abattit cette fois-ci sur Chelsea, à propos de Matthew et du dernier jour passés ensemble où tout avait volé en éclats à propos d'April, bien qu'elle ne la portait pas dans son coeur par obligations, la brunette n'avait jamais voulu qu'une telle chose arrive. Il fallait croire que l'amour que Matthew lui portait n'était pas si fort que cela, et que l'amitié qui liait Matt' à April avait vraisemblablement elle aussi des failles et n'était pas si indestructible comme avait pu le prétendre le jeune homme. D'ailleurs elle ne revenait pas que ceci ce soit produit, c'est vrai quoi, avec Austin, jamais ils ne se prendraient la tête pour une telle chose, il n'apprécie pourtant pas si bien Matthew, mais il le respecte lui, April est bien incapable de faire la même chose avec Chelsea, et pourtant elle se dit "meilleure amie de Matthew" et qu'elle ferait tout pour son bonheur ? Mouais on y croit tous ! Enfin quoi qu'il en soit, même si elle essaie de faire abstraction de tout ça, cette histoire lui prend beaucoup la tête. Et malheureusement pour elle, Taylor est loin d'être dupe, il a vu clair dans son jeu, et sa tentative de changement de sujet est tombée à l'eau. Elle prit un kiwi dans la corbeille de fruits exotiques que le grand blond lui tendait, et commença à couper le fruit tout en répondant au jeune homme.

- Je sais bien oui et tu es adorable, mais je crains qu'il ne me faille plus que de simples conseils pour réussir à rattraper le coup... Vraiment ? Toi aussi ? Non je ne trouve pas cela étrange, au contraire, c'était ce que je me demandais en réalité, si d'autres que nous trois, avaient vécu quelque chose de similaire. Je suis d'accord, c'est la meilleure chose à faire effectivement, mais s'il refuse de m'écouter ? Sortant de ta bouche, tout a l'air si facile... Soupira-t-elle avant de reprendre. Ce n'est pas de la honte, je m'en veux juste et d'un autre côté je suis triste et déçue qu'il puisse penser que tout est ma faute, alors que ce n'est pas le cas. Elle continuait de l'écouter avec attention. J'espère vraiment que tu vois juste. S'il tient sincèrement à moi oui, mais peut-être que ce n'est pas le cas, enfin, je sais qu'une de ses ex me ressemble énormément, peut-être m'appréciait-il juste à travers elle, parce que je suis son portrait craché, je ne pourrais jamais le savoir de toute manière. Tu as raison oui, il faut que je garde la tête haute et que je ne perde pas de vue mes objectifs, après tout des garçons il y en a des tas, le plus important c'est que je réussisse à percer à MODE non ? Elle essayait elle même de s'en convaincre, mais c'était particulièrement difficile, il pourrait bien y avoir des milliers de garçons à ses pieds, pas un ne vaudrait Matthew, pas un ne serait... lui. Je vais essayer, dit-elle en affichant un léger sourire comme pour le rassurer, lui montrer qu'il ne fallait pas qu'il s'inquiète trop pour elle. C'est toujours plus facile d'avoir un avis objectif sur les histoires de coeur des autres, pas vrai ? Déclara-t-elle en éclatant de rire, repensant qu'il y a encore quelques minutes, c'était elle qui occupait la place du sage confident qui donne des conseils.

Après quoi, Andrew prit tout de même le soin de répondre à la question de la jeune fille, qui, certes, avait été posée pour changer de sujet, mais tout de même elle s'intéressait vraiment à ce que faisait son journaliste préféré. Le jeune homme lui confiait alors ses intentions et son désir de se lancer dans l'écriture de nouvelles, bien différent de la presse, mais tout aussi passionnant et enrichissant. Quand il s'agissait de son travail, A.J était très dur et exigeant envers lui-même, toujours à la recherche de la perfection pour ses articles.

- Je suis sûre qu'il est déjà merveilleux et que tu sauras le peaufiner pour qu'il soit divin. Le manque d'inspiration ne dure jamais longtemps. Elle lui fit un clin d'oeil en souriant. Comme tu dis, ça va te changer de registre les nouvelles. J'ai donc hâte de lire le grand A.J ! Déclara-t-elle avec enthousiasme et joie. Oui j'ai écrit quelques articles sur les dernières collections sorties, mais en réalité c'était surtout par plaisir personnel, comme en ce moment je n'ai pas de stages, je n'étudie qu'à NH, je n'ai pas pu encore le montrer à un oeil expert, mais si tu veux, je te montrerai ça à l'occasion. Pour ce qui est du club journalisme, je crains que cette stupide "guerre des clans" ne fasse tout voler en éclats, New Heaven est en train de changer, tu as de la chance d'avoir déjà ton métier ! Déclara-t-elle agacée par cette situation qu'elle jugeait de totalement puérile, tout en émiettant d'énervement le morceau de croissant qu'elle tenait entre ses doigts. Si un jour tu recherches une assistante, fais-moi signe. Plaisanta la belle brune en regardant son ami.

Les deux amis profitaient d’un luxueux petit déjeuner à l’hôtel Hilton ; l’occasion rêvée pour Andrew de se changer les idées en appréciant l’agréable compagnie de Chelsea. Sa jeune protégée qui malgré son jeune âge avait déjà tout d’une grande. A.J était admiratif ; la jeune fille était talentueuse et réfléchie, bien qu’il demeurait encore gravé en elle, en grandes lettres noires, la fougueuse et impétueuse naïveté de la Jeunesse. Le journaliste trouvait cela touchant souvent, et quelques fois agaçant. Il tendit une corbeille de fruits à Chelsea alors qu’elle admirait d’un œil curieux le panorama ; la terrasse baignée par le soleil offrait une vue sans égale sur la ville toute entière. Le Hilton surplombait de son immensité majestueuse toutes les rues et les quartiers de Beverly Hills. Déposant la carafe encore pleine de jus sur la table, le mondain écouta attentivement sa protégée qui lui expliquait avec une sagesse fabuleuse son point de vue sur la situation ; le dandy acquiesça à maintes reprises, l’esprit errant de ci, de là, le regard captivé par les prunelles pétillantes de Chelsea. Ce qu’elle disait n’était pas si faux que cela ; il devait simplement prendre le temps de méditer. De peser le pour et le contre. Peut-être que finalement sa relation avec Joanna n’était-elle pas vouée à l’échec comme tous deux l’avaient décidé ? Sans doute, y avait-il un moyen de raviver la flamme ? Le brun posa son regard vers l’un des buildings de la ville avant de souffler bruyamment. Non pas d’ennui, mais d’acablement. Il comprenait parfaitement Chelsea et respectait sa prise de position, cependant les choses étaient bien plus complexes qu’elles n’y paraissaient. Il lui adressa un regard tendre tout en lui tendant un verre avec de l’eau fraiche. « Je sais. Mais tu vois, les choses sont on ne peut plus compliquées qu’elles ont en l’air. Je ne sais pas si je l’aime…La rage, le dégoût et l’amertume me sont encore en arrière goût. Il me faut du temps. Et il lui faut aussi du temps. Elle pense que je la considère comme une gamine. » Il soupira et rejeta sa tête en arrière, l’appuyant sur le dossier du fauteuil. « C’est une gamine ! » Cria t’il avec un peu plus de colère. « Si tu avais vu sa manière de se comporter avec les serveurs du restaurant à la Réunion, tu aurais également été en colère. J’en suis convaincu. Aucune tenue ! Aucun respect. J’ai eu terriblement honte ! » Le journaliste passa ses mains sur son visage pour en balayer ce sentiment encore ancré sur ses traits pâles. Le séjour Réunionnais était à gravé d’une pierre noire dans son esprit ; il s’en souvenait comme d’hier. Détail par détail. Les scandales de Joanna à l’hôtel. Et au restaurant chez les humbles locaux. Un éclaira traversa ses prunelles bleues alors que l’adolescente croquait dans un fruit. « Mais merci pour ton conseil. Je sais que tu ne veux que mon bien. Et je t’assure, m’éloigner de Joanna pendant un temps y participe ! » Il lui adressa un clin d’œil. Elle lui sourit, avant de reporter son regard étincelant, encore émerveillée par la féérie du lieu ; un tel hôtel si luxueux ne pouvait qu’inspirer le respect. Le journaliste esquissa un sourire en répondant à sa protégée. « Vraiment ? Je rêve de rencontrer ce patron ! Quel homme chic ! » Andrew lui fit un nouveau clin d’œil avant de prendre légèrement appui sur le dossier de son siège. « Cet hôtel est vraiment parfait. Le service est irréprochable, tout comme la chaleur qui s’en dégage. C’est un vrai refuge quand je ne veux pas retourner chez moi. Et bien, il y en a plusieurs. Je crois qu’il y a tout un étage attribué au monde. Il me semble. C’est ce qu’une amie m’a dit. Il faudra que je vérifie. Si tu es intéressée, je t’inviterai en Europe. Ou en Asie. Que préfères-tu ? » Un sourire se dessina sur les lèvres du jeune homme. Chelsea le lui rendit.

Vint ensuite son tour ; celui de se sentir mal à l’aise, honteuse et totalement confuse alors qu’ils abordaient un sujet tout aussi épineux que celui en lien avec Joanna. Matthew Cullen. Andrew avait déjà croisé cadet du clan Cullen à maintes reprises lors des galas et des grandes soirées organisées par Edward, Rosalie et Alice. Il n’avait pas d’affinités particulières avec le garçon ; il le trouvait un peu trop turbulent à son goût. Un peu trop négligé aussi. Le journaliste se méfiait assez de la relation tumultueuse que Chelsea entretenait avec lui ; connaissant son secret, il craignait que sa protégée apprenne un jour l’existence du sien. De ce fait, il se forçait sans cesse à paraître le plus humain devant, tout comme il le faisait devant les autres de la sphère dorée ; en buvant, mangeant et se comportant comme un mortel. D’un geste habile, le journaliste se servit alors une tasse de jus qu’il but en se forçant sous le regard de sa protégée qui appréciait silencieusement certains de ses conseils juteux. Malgré que Cullen avait l’air d’être un sauvage de première, il avait remarqué une fois en le voyant avec l’étudiante qu’il tenait à elle. Cette chose était inexplicable. Mais cela se voyait dans les yeux. Andrew connaissait assez bien les gens de sa condition pour décrypter sans la moindre difficulté leurs sentiments…Il reposa son verre vide sur la nappe blanche avant d’enchainer, cherchant ainsi à rassurer une fois de plus la jeune fille. « Dans ce cas, agis. Mes conseils ne sont là que pour t’aiguiller. » Il la gratifia d’un clin d’œil en l’observant éplucher un fruit. « Je ne sais pas comment interpréter ces rêves. Ils sont curieux. Mon futur..Enfin ce que j’ai cru voir comme tel n’est pas des plus glorieux. Mais je crois que ces songes ne sont là que dans le but de nous montrer ce à quoi peut ressembler l’avenir si nous continuions à maltraiter le présent. J’ai compris à mes dépends. Cela invite au changement. » Conclut le journaliste avec un petit sourire plein de mystère au coin des lèvres. Il avait vu l’avenir. Il l’avait palpé…Il en avait admiré toutes les couleurs, il avait été effrayé par toutes ses noirceurs. Désormais, Andrew voulait aller de l’avant. Il n’avait plus peur d’un futur de célibataire solitaire. Il avait essayé d’être bon avec Joanna…Le résultat n’avait hélas, pas été concluant. « Je sais que tout semble facile ainsi, mais tu dois essayer. Quitte à te faire mal regarder ou même ignorer, tu dois essayer de lui dire ce que tu as sur le cœur. S’il est un tant soi peu raisonable, il t’écoutera. Et si tu vois que la discussion est vaine, pars. Il reviendra vers toi tôt ou tard. Ne t’inquiète pas. Un homme aimant reste fidèle. Crois-en ma longue expérience dans ce domaine. Je ne sais pas pour cette histoire d’ex. A mon avis, il faut lui laisser un peu le temps et t’en laisser aussi. Tout reviendra bien vite dans l’ordre. Le fait de lui parler d’abord sera admirable de ta part. Il sera content même s’il ne l’avouera pas. Et par la suite, il reviendra et cherchera à se faire pardonner. Je suis comme ça, je sais de quoi je parle ! » Il sourit puis croqua à pleines dents dans une pomme bien juteuse. « Sincèrement, je ne sais pas. Ce que je sais, c’est qu’entre vous, il y a quelque chose. La manière si insistante avec laquelle il te regardait lorsque je vous ai vu la première fois ensemble n’est pas anodine. Et puis, voilà tout à fait ! Il reste toujours MODE. Je suis convaincu que tu vas y faire une entrée remarquée. Déjà avant que je ne parte, un ami m’a fait remarquer en lisant un de tes papiers qu’il a adoré ton style. C’est un expert et il est persuadé que tu vas faire une grande carrière dans le journalisme de mode. Tu seras une critique fantastique ! » Ils s’adressèrent mutuellement un sourire lorsqu’elle émit une remarque qui fit rire Andrew. « Tout à fait ! Désormais parlons d’autre chose. » Aussitôt, le mondain lui exposa son envie de changement ; passer du journalisme de presse à quelque chose de plus créatif, de plus transcendant. Il connaissait plusieurs écrivains et nouvellistes passionnés par leur métier. Il voulait faire pareil. D’ailleurs, A.J songeait à ce projet depuis tellement longtemps. « Oui heureusement. Ce sera un dernier article avant que je ne change de domaine. Déjà la parution de mon autobiographie narrée comme s’il s’agissait un roman d’aventure a rencontré un franc succès. Je pense sincèrement que je vais changer de style. Le journalisme de presse, avec quelques touches scandales et glamour, très peu pour moi. J’en ai plus qu’assez de commenter sans cesse les mêmes choses, de voir les mêmes visages. » Andrew hocha la tête alors que Chelsea lui affirmait qu’elle rédigeait quelques articles pour le plaisir. Elle lui parla de son université qui était sans dessus dessous. « Des enfantillages ! Grotesque. N’entre en aucun cas dans leur jeu. » Il lui adressa un clin d’œil avant qu’elle ne lui fasse une proposition, sur le ton de la plaisanterie, qu’il prit très au sérieux. « Je pense que je vais lancer quelque chose. Je veux avoir ma propre maison d’édition et mon propre journal. Je ne plaisante pas. J’ai les moyens pour le faire, maintenant il ne me reste plus que la main d’œuvre ! Je te veux dans mon équipe ! Si tu es partante bien sûr ! » Le journaliste croisa le regard surpris de sa protégée. Un sourire lui passa sur les lèvres. « J’y pense depuis longtemps déjà. Je veux me recycler dans quelque chose de nettement plus gratifiant, je veux changer. Sincèrement. » Son idée de changement était née des récents évènements qui avaient troublés sa vie ; la réunification des Taylor, ses aveux de cette lourde soirée, les fiançailles gâchées par Joanna…Il avait besoin de changement, de nouveauté.